mardi 22 novembre 2016

Dès son origine et tout au long de son histoire, le christianisme s'est morcelé en schismes, gnoses, épistémès et autres hérésies avant de se rassembler, souvent péniblement, et parfois partiellement.

L'une de ces oppositions, assez curieuse, concerne le Filioque, un conflit opposant l'Eglise d'Orient à l'Eglise d'Occident quant à l'Esprit Saint. Il est en partie responsable du schisme de 1054. Son importance est donc cardinale.

Jean parle de l'Esprit Saint qui sort du Père ; Paul parle de l'Esprit Saint du Fils ; le 2e Concile de Constantinople affirme que l'Esprit Saint procède du Père ; l'Anchoratus parle de l'Esprit Saint qui procède du Père et reçoit du Fils. Au IVe siècle, l'Eglise d'Occident affirme que l'Esprit Saint procède du Père et du Fils, tandis que l'Eglise d'Orient affirme que l'Esprit Saint procède du Père seul. Il y avait donc du pain sur la planche pour les théologiens. Ils se sont déchirés à ce sujet pendant des siècles et c'est toujours aujourd'hui une pomme de discorde entre les deux Eglises maintenant réconciliées mais toujours antagonistes.

L'Eglise d'Occident prétendait à l'hégémonie car elle tenait son pouvoir de Pierre et le pape siégeait à Rome. Mais l'Eglise d'Orient se prévalait de la langue grecque, utilisée originellement et exclusivement dans toutes les Ecritures ; le prestige de Constantinople ne le cédait en rien à la grandeur de Rome.

Les conflits théologiques s'étant multipliés et envenimés, les excommunications réciproques fulminèrent et la rupture intervint en 1054. Les haines religieuses sont féroces, plus encore peut-être que les rancœurs sentimentales. L'apaisement est quand même intervenu, mais assez tardivement. Les excommunications de 1054 ont été levées en 1965.

A ses débuts, l'Eglise se démenait avec son dieu en trois personnes. La Trinité était mystérieuse et les théologiens discutaillaient à son propos. Ils se donnent volontiers à la chicane mais cela pouvait mal tourner. Il aurait été plus simple de dire que dieu a trois qualités principales : le Père est la puissance, le Fils est l'amour et l'Esprit Saint est l'intelligence ; ces qualités peuvent se manifester indépendamment ou conjointement.

Mais les théologiens veulent tout compliquer, de telle sorte que plus rien n'est compréhensible. Les tempéraments s'affrontent et se braquent. Les querelles dégénèrent parfois en attrapades sanglantes comme l'histoire en mentionne ici et là. De telles saugrenuités sont en effet parfois dangereuses comme dans l'exemple suivant.

(Ex 4, 22) "Ainsi parle Yahvé. Mon fils premier-né, c'est Israël".

Une analyse rudimentaire de ce petit apophtegme a conduit des théologiens imaginatifs à déraper sans contrôle. Si le premier-né de Yahvé est Israël, alors il devra être sacrifié comme l'étaient les premiers-nés des phéniciens au dieu Baal et comme l'ont été des enfants, lors d'holocaustes pratiqués par les juifs au moment des persécutions accompagnant les première et deuxième croisades ; ils espéraient ainsi échapper à l'extermination et apaiser la colère de Yahvé.

Rien n'est pire que les doctrinaires lorsqu'ils laissent leur esprit s'échauffer et battre la campagne.

Alors que l'Eglise d'Occident n'a cessé au cours de l'histoire de modifier sa doctrine, de pratiquer des aggiornamentos et d'y trouver, semble-t-il, son content, les pratiques de l'Eglise d'Orient sont bien différentes. Les orthodoxes considèrent que la Vérité a été dite une fois pour toutes il y a deux mille ans et qu'il n'appartient à personne d'y changer quoi que ce soit.

Ainsi, les orthodoxes utilisent toujours le calendrier julien et leur Bible n'est autre que la Septante. Lorsqu'on assiste à un office, on est agréablement impressionné par des chants magnifiques interprétés par des chœurs d'hommes. C'est que ces chrétiens-là appliquent les paroles de Paul :

(I Co 14, 34) "Que les femmes se taisent dans les assemblées, car il ne leur est pas permis de prendre la parole ; qu'elles se tiennent dans la soumission, ainsi que la Loi même le dit".

Paul n'en est pas resté là.

(I Co 11, 3) "Je veux cependant que vous le sachiez : le chef de tout homme, c'est le Christ ; le chef de la femme, c'est l'homme".

(I Co 11, 8,9) "Ce n'est pas l'homme en effet qui a été tiré de la femme, mais la femme de l'homme, et ce n'est pas l'homme, bien sûr, qui a été créé pour la femme, mais la femme pour l'homme".

Les théologiens ont disputaillé sur ces aphorismes pour en adoucir la portée, mais leur culbutis de spéculations n'est guère convaincant par quelque bout qu'on le prenne. Le texte est des plus clairs et il est malaisé d'y trouver autre chose que ce qu'il dit. Néanmoins, on pourrait y voir une intercalation judaïsante pour gauchir la pensée de l'apôtre, lui enlever son auréole et le rendre malplaisant.


Aucun commentaire: