lundi 12 septembre 2016

Lors d'une visite impromptu dans l'hexagone, le Premier ministre israélien avait engagé les juifs de France à rejoindre Israël où ils seraient en sécurité et à l'abri d'agressions antisémites. Profitant de la circonstance, les juifs s'étaient bousculés dans les médias, où ils sont toujours bien reçus, pour se plaindre amèrement de l'antisémitisme dont ils sont les victimes, pour menacer de quitter le pays et de partir pour Israël leur vraie patrie. C'était l'antienne bien connue : "Retenez-moi, ou je pars". Les politiciens s'étaient aussitôt jetés sur cet os et l'avaient rongé jusqu'à la moelle. Avec des trémolos dans la voix, ils avaient prié les juifs de rester car ils sont si bons et beaux, si généreux et désintéressés, et ils sont tellement utiles qu'on souhaitait sincèrement qu'ils continuent à nous honorer de leur présence. C'était le discours politiquement correct rédigé en langue de bois. L'homme de la rue avait des mots très différents : "S'ils veulent partir, qu'ils partent, personne ne les retient". Car ce petit chantage débile était non seulement réducteur mais il était surtout humiliant pour la population non juive. Cependant, si quelques juifs avaient choisi de changer d'air et de prendre leur envol vers les cieux plus sécurisés de Palestine, on peut gager qu'aucun diamantaire anversois n'aurait retenu cette option.

Sur ces entrefaites, en apprenait qu'un cimetière juif avait été profané : de nombreuses pierres tombales déplacées, des stèles abattues et des objets cultuels brisés. Aucune inscription ou marque quelconques ne permettait de déterminer le mobile des auteurs. Aussitôt, ce fut une levée de boucliers. Les responsables juifs, rabbins en tête, se précipitèrent pour dénoncer cette nouvelle atteinte aux symboles juifs et en particulier le sacrilège de la violation de tombes comme si l'on avait voulu s'en prendre aux juifs jusque dans leurs restes. Les dénonciations de l'antisémitisme faisaient les grands titres et le Premier ministre lui-même s'était fendu d'une de ses déclarations très musclées dont on sait qu'elles font ses délices. Mais, lorsqu'un cimetière chrétien est vandalisé, ce même Premier ministre se distingue fâcheusement par un silence de catacombe. La consternation était donc générale et il n'était question que de la résurgence de l'antisémitisme et des mesures drastiques qu'il fallait prendre pour éliminer une fois pour toute cette hydre toujours renaissante. On apprit bientôt que les auteurs n'étaient autres que cinq jeunes gens mineurs issus des environs dont les motivations n'étaient nullement l'antisémitisme. Ces jeunes gens innocents et désœuvrés ne cherchaient que le jeu et la distraction. Ils s'ennuyaient et n'avaient rien trouvé de plus marrant que d'aller gambader dans ce vieux cimetière et de renverser quelques pierres rabougries et rongées par les intempéries. Ils étaient tout ébaubis du retentissement de leur incartade. Mais qu'à cela ne tienne, le fait était qu'un cimetière juif avait été profané et, quoi qu'on en dise ou en pense, il y avait là-dessous une volonté, une imprégnation antisémite du corps social, un relent détestable qu'il fallait dénoncer encore et encore. Entouré des rabbins, des télévisions et des radios, des journalistes de toutes mouvances et des nombreux animateurs d'associations juives, le Président de la république lui-même s'était déplacé sur les lieux et avait tenu un discours très édifiant et très applaudi. On est cependant surpris que le même Président de la république ne se soit jamais rendu sur le terrain lorsqu'un cimetière chrétien est vandalisé ; il aurait pu profiter au moins d'une de ces occasions pour manifester son indignation par un discours proportionnel à l'offense faite à la culture française. Mais, lorsque les images de la télévision ont été diffusées, on a pu constater que, décidément, le cimetière juif en question n'était pas du tout entretenu. Les tombes étaient couvertes de moisissures. Elles étaient noircies par la saleté, les lichens et les mousses. Les lieux étaient envahis par les herbes folles et les broussailles. Personne, depuis bien longtemps, ne le fréquentait plus. Les juifs et autres rabbins, pleurant dans le micro des journalistes, ne sont pas si attachés que cela à la mémoire de leurs anciens puisqu'ils les ont abandonnés sans le moindre soin aux injures du temps et de la nature.


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