lundi 18 avril 2016

Dès sa publication, la LXX eut un grand succès en Palestine. Des traductions en langues locales sont vite apparues et ont obtenu une audience certaine. Elles ont provoqué une forte adhésion comme l'attestent les manuscrits de la Mer Morte. Rédigés entre la fin du IIIe siècle avant J.C. et le milieu du Ier siècle de notre ère, ces manuscrits contiennent de grands passages grecs de la LXX mais aussi des fragments en araméen et même des extraits transcrits dans l'ancienne langue des phéniciens dont le sauvetage d'une partie de l'alphabet et de son usage sont précieux car ils étaient en voie de disparition.

La large diffusion de la LXX a donné aux juifs, ci-devant phéniciens, une occasion d'espérer. Les exploits des israélites et leur protection constante par le dieu Yahvé, ci-devant Baal, ont provoqué l'enthousiasme et la conversion. Les descriptions du caractère du dieu et de ses exigences étaient familières aux nouveaux juifs en ce qu'elles différaient peu de celles du principal dieu des phéniciens dont le fantôme tardait à disparaître dans les brouillards du passé. La transition était assurée dans la Septante. La mythologie phénicienne reste en trame dans le judaïsme. La continuité est entretenue par le récit d'épisodes terribles et même épouvantables mais qui sont vite atténués par des périphrases grecques qui en gomment l'impression désagréable ainsi que par un souci constant de maintenir une même ligne morale.

Les nouveaux juifs se sont organisés rapidement. Ils ont créé de toutes pièces un clergé qui a eu tôt fait de caporaliser la population et donné au judaïsme des bases solides dans une Palestine reconstruite après les dévastations provoquées par le passage des armées grecques au IVe siècle avant J.C.

La diffusion de la Septante a été importante dès sa composition. Son succès ne s'est pas démenti dans les siècles suivants. On compte des éditions en araméen, en samaritain, en géorgien, en arménien et dans beaucoup d'autres idiomes. Lorsque les falashas, ces juifs noirs éthiopiens, ont été découverts au XXe siècle, on s'est aperçu qu'ils utilisaient, depuis toujours, la Bible des Septante traduite dans leur langue vernaculaire. Aujourd'hui encore la Septante est l'Ancien Testament de l'Eglise orthodoxe.

Mais les juifs n'aimaient pas le grec, cette langue trop précise, trop répandue et internationale ; cette langue qui appartenait finalement à tous alors qu'ils voulaient une langue bien à eux, dans laquelle il pourrait mieux exprimer leurs sentiments, dire leurs émotions et leurs passions d'une manière tout à fait personnelle ; une langue que personne ne pourrait utiliser sans les avoir pour référents.


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