Pour tenir le peuple en main, les politiciens ont divisé les travailleurs en trois catégories : les ouvriers, les employés et les fonctionnaires.
Ces trois grands groupes de travailleurs sont régis par des lois et des règlements très différents, parfois même opposés. Il est bien inutile de les détailler ici, on n'en finirait pas, mais les ouvriers savent qu'ils sont défavorisés par rapport aux employés et ceux-ci comme ceux-là ont conscience qu'ils sont laissés-pour-compte au regard des privilèges des fonctionnaires.
Les politiciens proclament, contre toute logique, que le travail manuel distingue les ouvriers et qu'ils doivent être encadrés par des protections particulières mais aussi subir certains handicaps quant à des avantages dont, dans leur situation, ils ne tireraient aucun bénéfice ; qu'il en va de même des employés dont le travail moins pénible et plus intellectuel est suffisamment différent de celui des ouvriers pour qu'ils soient gouvernés par des règles spéciales ; que les fonctionnaires, par leur importance même, doivent faire l'objet d'un traitement propre quant à la stabilité de leur emploi mais aussi en raison de leur attachement aux valeurs de l'Etat dont ils sont non seulement les mandataires mais aussi les défenseurs.
Cette rhétorique ne repose sur rien. Aujourd'hui surtout, le travail des ouvriers est beaucoup moins pénible car des engins de toutes sortes suppléent à l'effort physique ainsi qu'à la dextérité manuelle mais le maniement de ces assistants techniques demandent souvent des compétences intellectuelles au moins aussi exigeantes que celles des employés. Quant au travail des fonctionnaires, il se situe en valeur tout en bas de l'échelle. Ce sont surtout et presque exclusivement des petits soldats de l'Etat qu'ils protègent par la police mais aussi par les lois et règlements qu'ils appliquent le plus souvent sans état d'âme mais parfois aussi avec un zèle pervers.
Il est fort commode de diviser les travailleurs et de soutenir tantôt un groupe et tantôt un autre. Chacun considère son avantage et ne plaint guère le sort de l'autre. Les révoltes de l'une ou l'autre catégorie de travailleurs sont peu dommageables pour l'Etat. Ces petits feux de broussaille sont éteints au moyen d'une petite faveur. Cette politique assure au pouvoir un règne confortable et empêche l'union des travailleurs. Si celle-ci devait se produire, il n'est guère douteux que la masse du peuple en colère constituerait une menace que, jusqu'ici, l'Etat a réussi à contenir en divisant les travailleurs et en les enfermant dans des catégories suffisamment hermétiques pour qu'elles constituent des groupes sociaux autonomes voire antagonistes.
Tout cela a nécessité des lustres de travaux législatifs et réglementaires au point que leur somme remplirait une bibliothèque tout entière.
Le temps est venu de simplifier tout cela et d'unifier le peuple des travailleurs en considérant l'analogie des conditions sociales de tous et leurs intérêts communs. Il faut jeter au feu tous ces vieux papiers qui consacrent et entretiennent la division entre les travailleurs. Il faut fusionner les trois catégories de travailleurs. Les ouvriers, les employés et les fonctionnaires ne doivent plus former qu'un seul groupe social. Ils doivent être réunis sous les mêmes lois, subir les mêmes désagréments mais aussi profiter des mêmes avantages.
Evidemment, l'Etat s'opposera de toutes ses forces à ce projet révolutionnaire car il y laisserait sans doute l'essentiel de son pouvoir et peut-être même son existence.
Mais à quoi bon rompre la chaîne de l'Etat si c'est pour tomber sous la férule d'un maître peut-être plus dur encore. Les travailleurs sont sans cesse manipulés par des syndicats dont les méthodes n'ont pas évolué depuis le XIXe siècle. Les meneurs ne connaissent d'autres règles que celles qu'ils décrètent. Les travailleurs sont contraints à des actions politiques sans rapport avec leurs intérêts et sans jamais être consultés. Le peuple est ainsi brimé par quelques despotes dont il doit subir les humeurs.
C'est pourquoi, après avoir unifié ses forces, le peuple devra encore lutter pour sa liberté en conquérant son autonomie, en érigeant chacun en travailleur indépendant, maître de lui-même et débarrassé de toute tutelle. La société en sera transformée car le travailleur sera débarrassé de tout lien de subordination.
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