lundi 5 janvier 2015

Mamie Loto, comme son surnom l'indique, organisait de temps à autre une petite séance de loto depuis presque quatre ans. Il s'agissait pour elle et d'autres personnes, pensionnés et petites gens seules ou isolées, d'une simple distraction rompant la solitude et permettant de se rencontrer, d'échanger ou commenter les on-dit et les rumeurs du quartier.

Les chanceux emportaient des récompenses modestes et les gains modiques de l'opération servaient à secourir des malheureux ou étaient versés à des associations.

Tout ce petit monde se divertissait entre soi et personne ne s'était jamais plaint. "Tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles".

C'en était trop pour l'Administration et la Justice qui ne supportent pas que le petit peuple se divertisse calmement sans leur autorisation et sans leur surveillance.

Mamie Loto fut accusée de "loteries prohibées, abus de confiance et infraction fiscale". Elle fut renvoyée devant le tribunal correctionnel où elle comparut entre deux gendarmes.

Le juge dissimulait avec peine un gloussement de jubilation lorsqu'il l'a admonestée devant tout le public rassemblé au tribunal, lorsqu'il lui a représenté la honte de son comportement, son ingratitude à l'égard de la République à laquelle elle doit tout et l'exemple déplorable d'une vie dissolue qu'elle donne autour d'elle, en particulier à la jeunesse incitée à l'inconduite par le spectacle de son incivisme invétéré.

Enfin, après l'avoir retournée sur le gril, cédant à une habitude bien ancrée chez les magistrats lorsqu'ils châtient injustement, le juge devait rire sous cape en condamnant Mamie Loto, 77 ans, 650 euros de pension, à 6 mois de prison avec sursis et à 123.000 euros d'amende.

Désespérée, Mamie Loto est morte le jour de Noël.



Aucun commentaire: